mercredi 5 juin 2013

Le retour du tragique


La pérennité de la civilisation occidentale ne peut être assurée que si celle-ci est en mesure de retrouver et de consolider les valeurs spirituelles qui la fondent.
Quelles sont-elles ? Rome, Athènes, Jérusalem, c’est-à-dire le Droit, la Création et la Sainteté.
Les pays du Sud, l’Espagne, l’Italie, la Grèce sont catholiques. La France bien qu’elle se dise laïque depuis 1789 demeure la fille ainée de l’église. On en a eu la preuve à travers les dernières manifestations qui se sont déroulées à Paris contre le mariage pour tous.
Ces différentes nations sont les héritières de la culture grecque. C’est à travers elles que se sont perpétués la science, l’art et la philosophie.
Le marché anglo-saxon de son côté est l’héritier de la réforme protestante. C’est elle qui scelle son pragmatisme.
Les juifs enfin, à travers la Repentance selon les Papes Jean XXIII et Jean-Paul II, ont repris leur véritable dimension. Ils apparaissent pour ce qu’ils sont, le socle de notre civilisation, celui de la Loi.
Si nous savons aujourd’hui reprendre en compte notre héritage, nous serons très puissants face aux défis des nations émergentes.
La Révolution Française et les principes qui en découlent, la laïcité et sécularisation générale de la société ne sont qu’un épisode sur la route du Retour du Spirituel, dont la résurrection d’Israël a constitué le signal.
Plus que jamais, nous avons besoin de refonder une relation au sacré. Elle seule peut nous revivifier.
Face au marché américain tout puissant certes, mais qui montre ses limites à travers son anarchie même, seule se dresse la dimension tragique de notre culture.  Elle est celle de la gratuité, du don, de la Présence et du désir au-delà du pur profit, de l’efficacité et de la rentabilité.
Cette dimension est celle de l’héritage grec. Elle seule peut constituer un équilibre avec le marché anglo-saxon. C’est l’Europe qui la porte. Elle lui est consubstantielle. Sans elle l’Occident ne pourra s’affirmer face aux nations émergentes.
En Europe, il existe actuellement des divergences entre l’Allemagne protestante, pragmatique, qui déploie la plus grande puissance économique et les pays du Sud qui ont une relation à la culture, plus proche de la qualité de la vie, de la création et de la beauté. 
« La beauté sauvera le monde » : Dostoïevski. Elle n’a pas pour vocation de rapporter, mais d’être.
Or cette dimension en aucun cas ne saurait s’allier à la seule dimension sociale, à la pure rationalité, en un mot au matérialisme. Seul le sens du sacré peut l’accompagner.
C’est pourquoi les évènements sociétaux qui viennent d’advenir en France sont de la plus haute importance. Ce sont des mouvements de Civilisation comme le furent, quoiqu’on puisse en penser par ailleurs, ceux de 1968. Ils portent en eux une très puissante exigence de spiritualité.
Le mariage pour tous, la théorie du genre constituent d’authentiques dangers, et le paradoxe est que ceux qui les défendent n’y ont pas recours pour eux-mêmes. Il s’agit davantage d’une manœuvre de diversion politicienne. Ces dangers consistent en celui de l’indifférenciation. Il n’y a plus de séparation d’avec soi-même, d’avec l’autre et d’avec Dieu. Nous sommes ici dans la fusion, dans la transparence, dans l’égalité, c’est-à-dire dans la mort.
L’égalité et la transparence, au sens révolutionnaire du terme, portent en elles la terreur.
Ce qu’il faut refonder au contraire, ce sont les notions de Différence et de Secret, au nom même de l’Homme et de la Création.
Au centre de celle-ci il est un noyau dur, insécable. C’est la dimension de l’innommable, de l’imprononçable, de l’irreprésentable. Les juifs la tiennent pour le fondement même de la civilisation.  C’est l’Espace de Dieu.
Le monde moderne est son pire ennemi. Son matérialisme veut à tout prix avoir raison de lui. Il souhaite la transparence, l’égalité, tout ce qui peut réduire l’Homme et le livrer aux bourreaux.  
Les mouvements contre le mariage pour tous vont bien au-delà de cette première revendication. Ils tendent à refonder une nouvelle relation au sacré.
On eut pu craindre que ce retour du Tragique porte en lui des dangers en particulier du nationalisme extrême tel que ce fut le cas dans les années trente.
Deux éléments militent pour éloigner cette crainte, d’une part l’existence de l’Etat d’Israël et d’autre part la nouvelle alliance entre juifs et catholiques.
La configuration du mouvement elle-même n’est pas à proprement parler nationaliste. Il s’agit d’une lame de fond venu de l’inconscient de la nation, de sa profonde spiritualité enfouie, en faveur du retour de notre société vers les origines de sa foi.
L’Eglise catholique, après 2000 ans et beaucoup de tourmentes, demeure un des fondements de notre civilisation. Désormais alliée au judaïsme, elle constitue un pôle très puissant.
La rationalité, les Lumières, les principes qui en découlent ne doivent pas être bannis mais remis à leur juste place, une place parmi d’autres dans une société plurielle.
Les politiques devraient tenter de prendre en compte cette immense espérance et essayer de l’intégrer.
Déjà elle les déborde.
Edouard Valdman, écrivain. Dernier livre paru « Demain, l’Occident ! » éditions l’Harmattan

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