au Théâtre Rive Gauche
avec JUDITH MAGRE
Il est des
comédiens qui possèdent un caractère de dangerosité certain. En effet, par la
grâce de leur talent, ils parviennent à tout exprimer, le pire comme le
meilleur. On ne sait pas si le texte qu’ils énoncent est bon ou mauvais. On les
écoute est on est sous le charme.
C’est ce que
j’ai éprouvé le 23 septembre dernier en entendant Judith MAGRE dire celui de
Oscar et la Dame Rose de Eric-Emmanuel SCHMITT au Théatre Rive Gauche.
J’ai d’abord
été conquis par la présence de la comédienne. Elle est seule sur scène. Elle
porte le texte. Elle en a toute la responsabilité.
J’avoue que
pendant quelque temps je ne suis interrogé à propos de cet écrit. Est-il léger
ou au contraire profond ? Ce n’est que progressivement que j’ai pris la
mesure de son intérêt. Conte fantastique, allégorie, il creuse très loin à
l’intérieur de l’angoisse humaine.
Oscar, un
enfant malade dans un hôpital a pour seule confidente la Dame Rose « Mamie
Rose ». L’auteur situe son personnage au cœur même de la souffrance et
fait de celle-ci la vérité de notre condition. Ce n’est pas la santé qui est la
normalité, c’est la maladie. On pourrait dire à son propos qu’il est absolument
lucide « La lucidité est la blessure la plus proche du
soleil » : René CHAR.
Ensuite, tout
s’enchaine. Oscar vit sa vie de douleurs avec légèreté. Éric-Emmanuel SCHMITT
parvient à donner de notre condition éminemment tragique une image poétique,
une image douce.
Cependant,
c’est le jeu de Judith MAGRE qui nous permet d’accéder à cette vérité. Ce sont
sa douceur, sa subtilité, qui nous prennent par la main et nous amènent
doucement jusqu’à ce degré.
J’allais
oublier l’humour. Cette pièce en est baignée.
Je connais
Judith MAGRE depuis longtemps. Jamais je n’ai saisi avec plus d’intensité la
subtilité de son jeu. Jamais je n’ai éprouvé avec plus d’évidence l’infinie
transparence de sa voix, qui par la richesse de ses tons, nous amène jusqu’à
l’ineffable.
Qu’elle en
soit remerciée !
Edouard VALDMAN