vendredi 17 janvier 2014

A l'occasion de la mise en scène de la pièce de Jon Fosse avec Ludmila Mikaël au théâtre de L'Oeuvre à Paris sept-oct 2013 "Et nous ne serons jamais séparés"


Le vas-et-viens entre son désir de solitude, celui de l’autre, son désespoir, son goût de l’absolu, ses allers et retours incessants entre ces diverses dimensions de son être, son immense souffrance…

Une femme sur un divan crie sa difficulté d’être…

Dans la Bible, les hommes ont rarement des enfants avec leurs épouses. Sarah offre sa servante à Abraham. Ce sera l’origine d’un vaste malentendu historique.

Avant de rencontrer la sienne, Jacob subit les multiples dictats de Laban, son beau-père.

Les choses se passent rarement comme les hommes le désirent. Elles adviennent la plupart du temps ailleurs et autrement. L’homme n’est pas le maître. Quelqu’un manipule le jeu. L’inconscient ?  Dieu ?

C’est ce que semble dire l’auteur, Jon Fosse.

Il fallait pour dire ce texte, au bord de la psychanalyse, une comédienne plus que remarquable par son talent, elle-même hantée par les mêmes démons, au bord du délire.

Pari gagné.

Ludmila Mikaël y ajoute beaucoup d’humour. Sa personnalité donne à ces problèmes très complexes une crédibilité en même temps que chair et vie. Elle tend à prouver qu’à travers l’art tout est possible. Il suffit d’avoir assez de hauteur pour s’élever au-dessus du désespoir par l’humour qui en est la forme la plus achevée.

Etrangement, ce rire ne mène pas nulle part. Comme le dit si bien l’héroïne de la pièce « je suis très intelligente ».

Si elle ne sait plus où elle, si elle est égarée, c’est qu’elle attend dans la douleur et qu’en fin de compte cette attente postule la rencontre. Celle-ci n’est tellement angoissée que parce que l’héroïne sait qu’elle sera très importante.

Sera-ce la rencontre avec Dieu, avec l’amour, avec soi ce qui serait peut-être une seule et même chose ?

Cette pièce si désespérée au premier abord, si folle est en fait un acte de foi.

Cette femme est crucifiée par son désir même, par sa passion. Elle est au centre de son désir comme au centre de la croix, comme le Christ l’était lui-même.

Toute cette souffrance, toute cette tension et cet égarement postulent une réunification, une réconciliation de l’être autour d’une rencontre.

Sans doute avec l’autre en soi.

Edouard Valdman

18 septembre 2013


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