vendredi 6 décembre 2019

A PROPOS DE « J’ACCUSE » DE ROMAN POLANSKI


Je ne sais si Roman Polanski a enfreint la loi en matière de relation avec les femmes. Une affaire aux Etats-Unis a fait beaucoup de bruit. Elle est très ancienne. La victime a retiré sa plainte. Un procureur s’accroche toujours au dossier. Il a envie sans doute de se faire de la publicité. Polanski est ainsi interdit d’entrer aux Etats-Unis. Il risquerait une arrestation. La liberté américaine s’arrête où commence la publicité.

En France, le même Polanski est accusé par une autre femme pour une agression sexuelle qui aurait eu lieu il y a plus de trente ans. Si celle-ci n’a pas déposé plainte plus tôt c’est que l’affaire n’était pas mure. Le film « J’accuse » aurait ranimé sa flamme.

En tout cas, le caractère hautement problématique de ces accusations n’empêche pas de mettre le réalisateur au pilori. Des manifestations de féministes ont lieu devant différents cinémas dans le but d’empêcher la diffusion du film.

Ce qui est affligeant et très inquiétant dans tout cela, c’est que la justice est mise à mal. Aujourd’hui n’importe qui, pour des motifs la plupart du temps fallacieux, peut mettre en cause n’importe quel citoyen.

C’est ce qui s’est passé dans le domaine politique avec François Fillon. Il n’est toujours pas jugé. C’est ce qui se passe avec Polanski, autrement. On n’a pas besoin de preuves, de jugements ou de condamnations. La suspicion suffit pour comparaitre devant les instances médiatiques, désormais les véritables juges. L’Etat ne réagit pas. Davantage, il utilise les moyens de la calomnie à des fins hautement partisanes.

Que Polanski, un réalisateur de génie (« Tess », « Le pianiste ») puisse être mis en cause par des pseudo-victimes, trente ans après les faits, sans aucun commencement de preuve, montre suffisamment à quel point notre démocratie est dans un état de décomposition avancée.

Bien plus, comment ne pas faire le lien entre « J’accuse » et ces affaires, c’est-à-dire entre l’éternel proscrit, le juif, et les accusations erronées, car c’est cela dont il s’agit. En embrassant le thème de « J’accuse », c’est-à-dire de l’affaire Dreyfus, Polanski embrasse en même temps celui du racisme.

Comme le disait Maurice Barres, l’écrivain le plus célèbre de ces temps, une des grandes consciences françaises « que Dreyfus soit coupable, je le connais de sa race ! ».

Que Polanski soit considéré coupable envers ces femmes, sans preuve aucune, « nous le connaissons de sa race ». La boucle est bouclée. N’est-ce pas cela que Polanski a voulu signifier à travers ce film ?

N’oublions pas que Zola a été condamné après son « J’accuse », qu’il a été obligé de quitter la France, que Dreyfus enfin a été gracié mais jamais acquitté.

L’Etat en France ne peut pas se tromper. Quoique l’on puisse en penser, le Roi est toujours là.

En fait, ce qu’il conviendrait de faire, c’est d’envoyer ce film admirable dans toutes les écoles de France et de l’y visionner, ce film qui dit exactement ce qui se passe depuis toujours : Ponce Pilate se lave éternellement les mains dans le sang du juste.

L’important pour la foule c’est de lyncher. Il y aura toujours un juif dans notre environnement, un autre, un noir, un émigré.

Cela ne se passera jamais à cause de nous mais à cause de l’autre en nous.

Les femmes qui accusent Polanski aujourd’hui sans preuve sont un des nouveaux visages du totalitarisme des temps modernes.

Etrange masque que celui-là. La beauté aurait désormais partie à l’horreur !

Edouard VALDMAN

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